IGP : whisky Alsacien VS whisky Breton

Si ce sont les Bretons qui ont donné le coup d’envoi dans la commercialisation de whisky Français – Warenghem en 1987 – les Alsaciens ont rapidement suivi et la région est également devenue incontournable sur la scène hexagonale!

En janvier 2015 les deux régions se dotent d’une IGP et publient respectivement un cahier des charges à respecter pour porter la mention « Whisky Breton » ou « Whisky Alsacien ».

Trois raisons majeures ont motivé la création de ces IGP:

  1. La nécessité. À cette époque la commission européenne s’apprête à interdire toute mention géographique sur les étiquettes si les produits concernés ne sont ni dotés ni d’IGP ni d’AOC.
  2. Volonté de transparence pour le consommateur.
  3. Apport de garantis en matière de provenance et de qualité.

Deux ans et demi après, on compte cinq distilleries dans l’IGP Whisky Breton (WarenghemDistillerie des Menhirs, Naguelann, Fisselier et Sainte Colombe) et quatre dans l’IGP Whisky Alsacien (Bertrand, Hepp, Miclo et Lehmann). De nouveaux arrivants pourraient intégrer les IGP dans les années à venir, on pense notamment à Naguelann et à Lancelot (la Mine d’Or) pour la Bretagne !

Quoi qu’il en soit, ces IGP en disent long sur leur région et sur le whisky en général… C’est pourquoi l’équipe de whisky-francais.com vous propose d’en découvrir les principales différences à travers un tableau comparatif du cahier des charges de chaque IGP! Mais avant ça, faisons le point sur la réglementation européenne: « que dit-elle sur le whisky? »

  • Le whisky ou whiskey est la boisson spiritueuse obtenue par distillation d’un moût de céréales maltées avec ou sans les grains entiers d’autres céréales.
  • Ce moût a été saccharifié par la diastase du malt qu’il contient, avec ou sans autres enzymes naturelles et fermenté sous l’action de la levure.
  • Il a subi une ou plusieurs distillations à moins de 94,8 % vols.
  • Le distillat doit vieillir pendant une période minimale de trois ans dans des fûts de bois d’une capacité inférieure ou égale à 700 litres.
  • L’ajout d’eau et de caramel ordinaire (pour la coloration) sont autorisés, en revanche toute adjonction d’alcool est interdite, de même, le whisky ne doit pas être édulcoré et/ou aromatisé ni contenir aucun additif. (sauf le caramel ordinaire utilisé pour la coloration).
  • Enfin, le titre alcoométrique volumique minimal du whisky ou whiskey est de 40 %.

Tout ce qui n’est pas encadré dans le règlement ci-dessus est par défaut autorisé. Si par exemple, je veux distiller un assemblage de céréales composé principalement de riz et que je l’élève 3 ans dans des fûts de Baobab, je peux l’appeler Whisky !

Maintenant, revenons à nos IGP qui respectent au minimum les règles européennes (qu’on ne re-citera donc pas dans le tableau).

Alsace Bretagne
Aire Géographique
(Le concassage de l’orge malté, le brassage, la fermentation, la distillation du moût fermenté, le vieillissement des eaux-de-vie, la réduction et la finition sont effectuées dans l’aire géographique, l’eau doit être puisée dans l’air également.)
La région Alsace constituée des deux départements : Haut-Rhin et Bas-Rhin. L’aire géographique est constituée par le territoire des communes des départements suivants: Côtes-d’Armor, Finistère, Ille-et-Vilaine, Morbihan, ainsi qu’une partie de la Loire-atlantique incluant la ville de Nantes (détails ici).
Céréales Orge maltée uniquement.

Les variétés transgéniques sont interdites.

Orge, blé, blé noir (sarrasin), triticale, seigle, épeautre, maïs ou avoine. Malté ou non.

Les variétés transgéniques sont interdites.

Brassage Le recours aux enzymes exogènes pour la saccharification de l’orge maltée est interdit. Le grain doit être concassé ou broyé à la distillerie.La mouture est ajoutée à de l’eau chaude d’une température supérieure ou égale à 50°C.
Fermentation Fermentation sans chauffage ni addition de produits chimiques visant à en réguler la durée. Pas de contrainte de durée.

Tout ajout visant a augmenter la teneur en sucre du moût est interdit.

Fermentation à la distillerie. Chauffage autorisé.

Il faut au minimum 36 heures et au maximum 12 jours entre le brassage et la distillation.

Tout ajout visant a augmenter la teneur en sucre du moût est interdit.

Alambic La Distillation peut être effectuée dans un alambic à repasse simple ou dans un alambic muni d’une colonne, à condition qu’il n’y ait pas plus de 3 plateaux.

La capacité de l’alambic ne doit pas dépasser 25 hectolitres.

La distillation peut être effectuée dans un alambic à repasse simple ou muni d’une colonne. Elle peut également être réalisée dans un alambic à distillation continue (comme un Coffey par exemple).

La capacité de l’alambic ne doit pas dépasser 60 hectolitres. (200 hectolitres par tranche de 24 heures en cas d’une distillation continue)

Distillation Discontinue. Avec ou sans colonne, il faut au minimum une double distillation.

La chauffe peut être à feu nu ou par introduction de vapeur dans une double enveloppe extérieure.

Le titrage du distillat doit être compris entre 60 et 80% d’alcool pur.

Discontinue ou continue. En une ou plusieurs passes. L’injection directe de vapeur dans le produit à distiller est interdite, tout autre mode de chauffe est admis.

 

 

Le titrage du distillat doit être inférieur ou égal à 88% d’alcool pur pour un alambic à repasse et à 94,8% pour un alambic a colonne.

Chai Hygrométrie et température régulées naturellement. Hygrométrie et température régulées naturellement.
Vieillissement Opéré dans des fûts de chêne pendant au moins 3 ans . D’autres essences de bois sont possible pour les années suivantes. Fût de chêne uniquement.
Réduction Réduction pour atteindre un titrage entre 40 et 65%. Réduction facultative.   Réduction facultative.
Finition Coloration interdite. Caramel pour coloration autorisé avec une obscuration maximale de 2%
Règles d’étiquetage complémentaires La mention « Single Malt » peut être utilisée lorsque le « Whisky d’Alsace » ou « Whisky Alsacien » est issu d’un moût brassé et fermenté dans un même lieu et distillé dans une seule et même distillerie.

L’utilisation de cette mention est réservée aux « Whisky d’Alsace » issus d’une distillation discontinue simple.

La mention de l’âge du whisky n’est possible qu’à partir d’une durée minimale de vieillissement de

6 ans

L’indication géographique « Whisky de Bretagne » ou « Whisky Breton » peut être complétée de la mention

« single malt » lorsqu’il s’agit de whisky :

– élaboré dans une seule distillerie ;

– exclusivement à partir d’orge maltée ;

– par distillation discontinue simple avec ou sans reflux externe ;

– distillé à un titre alcoométrique volumique, inférieur ou égal à 88 %

Si on constate beaucoup d’exigences communes dans ces deux IGP, qui vont toutes deux plus loin que la législation européenne, il n’en résulte pas moins deux façons d’appréhender le monde du whisky.

D’une part, l’IGP « Whisky Breton » favorise l’innovation – que ce soit en terme de matières premières ou d’appareil distillatoire – et permet des volumes de production conséquents.

D’autre part l’IGP « Whisky Alsacien » vise à garantir une authenticité et une production résolument artisanale.

Au final il convient de relativiser l’importance de ces IGP, en Bretagne comme en Alsace, certaines distilleries ont refusé d’y adhérer pour des raisons de principe et/ou techniques et financières. En Bretagne la controverse avait enflé jusqu’à prendre des allures de tragédie grecque et conduit Glann ar Mor à une fermeture (temporaire heureusement !).

Aujourd’hui, seulement deux ans après la création des ces deux IGP, le paysage du whisky en France a changé. Les distilleries se sont multipliées de telle sorte qu’on pourrait maintenant imaginer une IGP Sud-Ouest, Alpes… Ou encore whisky français !

Source : Nouveau règlement SpiritueuxCdC-IG-Whisky-Alsace, CdC_whisky-breton