La ferme distillerie Northmaen a récemment embouteillé un whisky de 12 ans d’âge, preuve que le whisky français a désormais atteint une certaine maturité ! Retour rapide sur l’histoire du pionnier du whisky normand.
Northmaen : Une ferme, brasserie, distillerie.
En 1997, lassé de la ville, Léo Camus achète une ferme près de Rouen et se lance dans la production de bière artisanale. En 1999, après un brassin raté, il refuse le gâchis et le distille avec l’aide de Dominique Rimbert, un bouilleur de cru ambulant. De cette expérience naît l’idée de produire du whisky. Il réalise ses premiers essais au début des années 2000 et, passionné de mythologie nordique (et non dénué d’humour), il donne naissance à son premier whisky : le fameux Thor Boyo. Rapidement, il s’équipe d’un alambic et fonde la première distillerie de whisky en Normandie.
Indépendant et débrouillard, Léo produit un whisky du champ à la bouteille. Seule l’activité de maltage est externalisée à la malterie Dingemans. Chaque année, il cultive 80 tonnes d’orge, qu’il brasse localement pour obtenir un wash avoisinant 7,5 %. Son alambic Armagnacais lui permet d’obtenir, en une seule passe, un distillat particulièrement riche, titrant à 65 %, qu’il enfûte tel quel. (Lire : L’alambic Armagnacais de Northmaen pour en savoir plus sur cette machine singulière )

Le vieillissement se fait dans trois chais aux conditions variées : une ancienne cave à fromage très humide où cohabitent moisissures blanches et champignons noirs, un chai sec et un dernier, soumis à de fortes variations thermiques, favorisant une extraction rapide des arômes. Northmaen privilégie les ex-fûts de vin de Bordeaux rebrûlés, mais ce qui nous intéresse aujourd’hui, c’est une expérimentation plus audacieuse : des fûts en acacia ayant contenu du vin blanc liquoreux stocké dans le chai humide.
Effectivement, ce sont ces fûts très particuliers qui donneront naissance à Kenning, un whisky dont le nom fait référence à une figure de style de la poésie scandinave, consistant à remplacer un mot par une périphrase métaphorique. Par exemple, « guerre » devient « vacarme des épées » et « Loki », « père du loup ».
Etant donnée que Jupiter met à peu près 12 ans pour faire le tour du soleil, «Kenning : Une révolutions de Jupiter» et un Kenning pour « Kenning 12 ans » !
Après une première édition de 6 ans d’âge, la distillerie Northmaen propose aujourd’hui un Kenning deux fois plus âgé. Dégustation !
Kenning 12 ans – Fût de sauternes en Acacia – 42%Nez : Le whisky s’ouvre sur des arômes gourmands de crème caramel légèrement brûlée, de pomme cuite et de pruneau d’Agen. Des notes empyreumatiques élégantes évoquent le bois noble et la cire d’encaustique, tandis qu’à l’aération, une touche de térébenthine et une subtile pointe de cannelle viennent enrichir le nez, apportant profondeur et complexité.
Bouche : pleine de contrastes, à la fois souple et puissante, la bouche s’ouvre sur des notes généreuses de caramel et de fruits secs, rapidement rejointes par des arômes de concentré de vanille et des raisins de Corinthe. Puis, de la pâte d’amande se mêle à des touches florales délicates, rappelant un pot-pourri avant que la palette aromatique n’évolue vers des épices de plus en plus présentes!Finale : Longue et intense, la finale s’ouvre sur des notes épicées de poivre, de gingembre et de muscade, avant d’évoluer vers des touches résineuses. Après de longues minutes on retrouve des pétales de fleurs blanches, laissant une empreinte raffinée et particulièrement persistante.
Malgré un degré plutôt bas, Kenning 12 ans est un whisky d’une intensité remarquable ! On voit ici le bénéfice des techniques de réduction lente utilisées par la distillerie Northmaen.