Distillation et Alambics, mise au point !

Whisky Français, Distillation et Alambic, Manuel de distillerie de M. Bucheler, 1899

Si le whisky est arrivé plutôt récemment en France, (1987 avec Warenghem) ce n’est pas le cas de la distillation !
L’Armagnac, première eau-de-vie de France est riche d’une histoire de plus de 700 ans. Si on ne s’en tient qu’aux preuves écrites, on remonte en 1310 avec une superbe éloge de l’eau-de-vie signé Vital Dufour et intitulé « pour garder la santé et rester en bonne forme » !
En matière de distillation nous avons donc de la bouteille !
Pas étonnant dès lors que la diversité des alambics soit une des caractéristiques du whisky hexagonal !­
Avant de s’attaquer au plus surprenant d’entre eux tels que l’alambic à vase de type Blavier utilisé par la brûlerie du Revermont, ou l’ex-alambic ambulant de Castan, whisky-francais.com vous propose de revenir sur les grandes lignes de la distillation de whisky en général.

 

Commençons par rappeler que la distillation vise à séparer des substances liquides dont les températures d’ébullition sont différentes.
L’alcool éthylique s’évapore dès 78,75°c (en condition normale de pression. ). En chauffant une bière ce sont les éléments les plus légers (dont les alcools) qui s’évaporent, on récupère cette vapeur et on la refroidit en la faisant passer dans un condenseur, que ce soit un serpentin de cuivre dans une cuve d’eau ou tout autre type de condenseur plus moderne.
Lors de la distillation, ce sont les composés les plus volatiles (dont les aldéhyde acétique qui bouent à 21,25°) qui s’échappent les premiers. Parce que leur goût est très désagréable on ne garde pas le début du distillat, on appelle ça couper les têtes (Un savoir-faire français en somme !).
Les éléments les plus lourds ne sont pas souhaitables non plus, l’alcool amylique qui s’évapore à 132,5°C à un goût fort et laisse une sensation de brûlé au palais, c’est pourquoi on coupe également les queues de distillation . On distille le tout deux ou trois fois histoire d’être sur !

Au cours de l’histoire les modèles d’alambic se sont diversifiés et perfectionnés, l’arrivée des colonnes de rectification représente une avancée notable.
Plutôt que de distiller plusieurs fois un même moût, on laisse la machine s’en charger. Dans un grand tube on place des plateaux qui vont gêner l’ascension des vapeurs et les contraindre à se recondenser de multiples fois. Ce procédé agit comme autant de mini distillation, c’est pourquoi l’alcool qui en sort est déjà consommable. On peut également faire transiter le moût dans un tube à travers la colonne pour le préchauffer. Ces modèles permettent d’économiser une seconde distillation, mais on doit toujours couper les têtes et les queues.

 

En 1826, Robert Stein imagine un alambic qui sera breveté par Aenas Coffey en 1830 et qui constituera une contribution majeure à l’industrie du whisky.
Au lieu de séparer les têtes et les queues entre chaque distillation, ont « trie » l’alcool avec deux colonnes.
Le schéma ci-dessous vous permet de suivre le trajet du moût à l’eau-de-vie !

Le moût est chargé en (1) , il est réchauffé dans la colonne de droite et arrive préchauffé par le haut de la colonne de gauche. De la vapeur chaude est injectée en bas de cette même colonne (2), tant est si bien que seuls les éléments lourds arrivent au fond de la colonne, ils sont alors évacués (3) (c’est ainsi qu’on élimine les queues). Les éléments plus légers repartent dans l’autre sens par le tuyau (4) et arrivent dans la colonne de rectification à droite en (4B). Grâce aux plateaux qui rendent l’ascension difficile , les éléments lourds là aussi restent en bas et son redirigés par le tuyau en (5) vers le haut de la colonne de gauche.  Les éléments les plus légers (les têtes) quant à eux s’évacuent par le haut en (6) . A mi-hauteurs (plutôt vers le haut tout de même) on a une évacuation (7) qui permet d’extraire l’alcool. On peut désormais distiller en continu.

 

Chaque étape de la distillation est cruciale et contribue au caractère de l’eau-de-vie.
Certaines distilleries écossaises vont jusqu’à reproduire les petits défauts dans la forme de leur alambic quand est venu l’heure d’en changer. En effet la forme de l’alambic a une importance capitale, et cela vaut autant pour la cuve dans laquelle on place le moût que pour le col de signe et le condenseur.

De même, la façon de s’en servir est loin d’être anodine, le distillat n’aura pas le même goût si la chauffe est faite à feu nu ou si elle est faite au bain-marie, pas le même goût non plus si l’alambic est chargé à fond ou non, et ainsi de suite….
Nous aurons probablement l’occasion de développer en détail ces différents aspects, en attendant, la semaine prochaine nous reviendrons à notre bon vieux terroir Français et on se penchera sur ce fameux alambic Blavier, conçu initialement pour la distillation de la lavande et qui sert désormais à produire un excellent whisky jurassien. Bien entendu, 0n en profitera également pour goûter !

 

Sources et images : Manuel de distillerie de M. Bucheler.1899, Wikipedia, « Opfindelsernes Bog » 1878 by André Lütken

Leave a Reply

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *