Uberach is the new Black

Présentés lors du whisky live 2022, les nouveaux Single cask de la gamme version Française sont arrivés en fin d’année. Comme à son habitude, l’embouteilleur indépendant frappe fort et propose des fûts d’exceptions et notamment un Uberach 2004 à la robe si sombre qu’on pourrait s’y perdre !

Présent dans le catalogue Antipodes de La Maison Du Whisky, ces 3 whiskies ont été dégustés et décortiqués par Jean-Marc Bellier, expert renommé, poète et directeur de la boutique historique du 20 rue d’ANJOU à Paris.

Le premier fût est une petite pépite en provenance de la roche aux fées. En 2017, Gonny et Henri font quelque test avec de l’orge tourbé. Tests qui donneront naissance à quatre barriques. La Roche aux fées 2017 et l’une de ces 4 expressions ayant vieillie en fut de vin blanc liquoreux puis en fut de bourbon.

Couleur : or vif.

Nez : à la fois frais et concentré. Révélant d’emblée une tourbe plutôt grasse et huileuse, le premier nez est également joliment herbacé (estragon, origan), vanillé, fruité (mirabelle) et poivré. À l’aération, derrière une fine âcreté, fumée et cendrée, la palette aromatique évolue vers des registres plus citronnés et médicinaux (baume, pansement). Progressivement, du miel d’acacia recouvre intégralement l’espace olfactif, lui procurant beaucoup de suavité tandis que s’affirment des notes de réglisse verte et de noix de coco.

Bouche : nette, élégante. Dans un premier temps, la même tourbe grasse et huileuse marque de son empreinte une attaque en bouche anisée irriguée par un jus de pomme délicieusement sucré et acidulé. Mentholé, le milieu de bouche révèle des saveurs plus exotiques (ananas, banane) et plus herbacées (foin coupé, orge verte). Laiteuse, la fin de bouche dévoile des notes de noix de coco et de lait d’amande. Désormais, la palette gustative brille non seulement par son unité de ton mais aussi par son caractère extrêmement délié.

Finale : longue, tonique. Derrière une tourbe devenue plus réglissée et mentholée, l’entame de la finale est intensément fruitée (pomme, poire, pêche, mirabelle) et noblement boisée (chêne, châtaignier). À la fois vanillée et tendrement épicée (cannelle, gingembre), l’arrière-bouche est remarquablement fraîche. La rétro olfaction s’approprie les notes miellées du nez tandis que le verre vide se révèle médicinal et camphré.

Jean-Marc BELLIER

Le second, est un fût du Domaine des hautes glaces. Contrairement au précédent embouteillage de la gamme, il s’agit cette fois-ci d’un whisky de seigle. Élevé dans des futs de vin jaune frais. Le whisky a connu une part des anges extrêmement importante, notamment lors de l’été caniculai.re 2022 où les anges se sont hydratés avec plus de 9% du précieux liquide.

Couleur : topaze.

Nez : riche, intense. Au premier nez, des notes de résine de pin, de cire d’abeille, de fruits compotés (mirabelle, prune jaune), de seigle et de cannelle constituent un ensemble olfactif extrêmement concentré. À l’aération, la palette aromatique devient notablement pimentée (Espelette, Cayenne), terreuse (argile) et herbacée (tabac à pipe). Puis, des parfums de lys, de concrète d’iris et de chèvrefeuille accentuent le caractère capiteux de la première étape de la dégustation.

Bouche : ample, tonique. En attaque de bouche, des fruits confits (citron, pamplemousse, mirabelle) sont recouverts par des gousses de vanille et par des notes médicinales (baume du tigre). Profondément terreux, le milieu de bouche déverse sur la langue une quantité impressionnante de seigle. Fraîchement balsamique (cèdre, thym, thuya), la fin de bouche met en valeur un distillat très pur.

Finale : longue, vive. Très concentrée, l’entame de la finale est marquée par des tannins de peau (raisin, mirabelle, pêche) particulièrement veloutés. D’une ferveur herbacée et vivifiante, l’arrière-bouche révèle d’éloquentes notes de laurier, de tilleul et de céleri. Dévoilant des saveurs oxydatives de curry, de noix et de raisin blanc, la rétro olfaction et les extraits secs du verre vide apportent une dimension très jurassienne à la palette gustative.

Jean-Marc BELLIER

Jean Metzger © Darmesh varane : https://www.darmeshvarane.com/

Enfin, la gamme propose cette année un whisky qui a traversé un part substantiel de l’histoire du whisky français. Un Uberach de la distillerie Bertrand distillé par Jean Georges Froelich en 2003, à une époque où la France ne comptait qu’une dizaine de producteurs de whisky, et enfuté dans une barrique de Banyuls par Jean Metzger en 2004. En 2016, Jean embouteille une première moitié du fût sous le nom de : Les Uberach Franchis, Fût 105. Le reste poursuit son vieillissement mais cette fois-ci, dans trois petits fut neuf de 20, 28 et 57 litres. Les deux premiers seront utilisés pour des assemblage et fin 2017, le fut de 57 litres, qui ne contiennent plus que 50 litres est immobilisé dans une dame-jeanne jusqu’à ce jour.

Couleur : acajou.

Nez : frais, profond. Au premier nez, des notes de marc de café, de fruits rouges (fraise, framboise), de champignons, de raisin de Corinthe, de chocolat et de goudron donnent une idée de la complexité et de l’originalité de la palette aromatique. À l’aération, des parfums de figue, de datte, de toile Émeri, de fleur d’oranger de laurier s’entremêlent divinement avec des senteurs de cuir de Russie, de noix grillée et de vanille caramélisée.

Bouche : ample, élancée. En attaque de bouche, des zestes d’agrumes (orange, pamplemousse) constituent le socle acide sur lequel repose la palette gustative. En milieu de bouche, des saveurs de confiture de figue et de figue fraîche arrivent sur le devant de la scène. Onctueuse mais tannique (peau de raisins et de cerises noires), la fin de bouche se révèle au fur et à mesure de plus en plus balsamique (vinaigre de Modène, bonbon des Vosges).

Finale : longue, subtile. En entame de finale, une fine pellicule de suie enrobe les papilles avec beaucoup de délicatesse. Remarquable de fraîcheur, l’arrière-bouche est marquée par des notes de zan. En rétro olfaction, les effluves d’un tabac à pipe huileux, des figues fraîches et des agrumes (citron, pamplemousse) imprègnent durablement les parois du palais. Le verre vide est automnal (champignon, châtaigne, feuille de laurier séchée).

Jean-Marc BELLIER

Un whisky qui est a la hauteur du mythique fut 103 de la distillerie Bertrand !