Le whisky, la bière et le chaudronnier

Lors de notre dernière visite à la distillerie de la Roche aux fées, nous avons eu l’occasion de gouter le fameux vin d’orge de Sainte colombe ! Une bière d’exception dont les barriques seront ensuite utilisées pour le whisky Roc’elf. L’occasion de repenser aux nombreux liens qui unissent la bière et le whisky !

La distillerie la Roche-aux-Fées tire son nom d’un dolmen de 19,50 mètres de long, 6 mètres de large et 4 mètres de haut !

Des céréales, de l’eau et des levures

La première chose qui vient à l’esprit quand on parle Bière et whisky, c’est bien entendu la matière première !

À l’exception du houblon, qui est prohibé pour le whisky, les deux boissons partagent les mêmes ingrédients. Dans les deux cas, le malt est principalement issu de l’orge même si d’autres céréales sont tout à fait envisageables. L’eau reste également un ingrédient majeur (une bière c’est 90% d’eau) et la levure est la clef indispensable pour transformer un brassin sucré en une boisson alcoolisée. C’est pour ces raisons que l’on dit souvent qu’un whisky est une bière (sans houblon) distillé. Au même titre que le cognac serait un vin distillé.

Bien entendu, produire un brassin en vue d’une distillation ne répond pas aux mêmes exigences que si l’on souhaite faire de la bière. Les variétés d’orges diffèrent : Pour le whisky les variétés Optic et troon dominent le marché tandis que les producteurs de bières affectionnent la Sebastian, le prestige ou encore les variétés RGT planet et KWS Irina. De même, les levures utilisées sont rarement les mêmes.

De la Brasserie à la distillerie

La maitrise de la bière demeure donc un atout pour quiconque souhaite se lancer dans la fabrication du whisky. En France, un certain nombre de distilleries étaient avant tout des brasseurs, Bercloux, Ninkasi, Rouget de l’île, TOS, la roche aux fées etc. … Cette spécificité a permis au whisky français de travailler sur une étape qui était trop peu évoquée jusqu’à présent : la fermentation.

En effet, en Écosse, on utilise des levures particulièrement efficaces capables de transformer un brassin en WASH en 40 à 60 heures. Or si cette étape est indispensable pour obtenir de l’alcool, elle permet également d’obtenir beaucoup d’autres arômes. Les levures, en dégradant le sucre produisent de l’éthanol et du gaz carbonique. mais également des esters qui apportent des arômes fruités et exotiques au mout (Pomme, Poire, Banane, ananas etc.)

Le récent Artesia de la distillerie TOS (Brasserie Saint-Germain) embouteillé par VERSION FRANCAISE illustre parfaitement l’intérêt aromatique de cette étape. Issue d’une fermentation longue, et après seulement trois ans et un mois de vieillissement, il présente un profil particulièrement riche et fruité.

Nez : Intensément fruité et exotique, le nez s’ouvre sur des notes d’ananas, de banane et de yuzu confit. La matière première est bien présente également : elle se traduit par des parfums de Porridge et de pain aux céréales ! Après une fermentation longue et une distillation en colonne, il ne reste de la tourbe qu’un léger et élégant voile de fumée qui enveloppe l’ensemble, accompagné de délicates notes de fleurs blanches et de pomme granny.

Bouche :  Onctueuse et tout aussi fruitée que le nez le laissait penser, la bouche délaye des arômes de kakis, de coings et de poire juteux qui partagent l’attaque avec des notes de tarte au citron et de bonbon à la pomme ! Frais, le palais offre de subtiles notes de menthe et de chlorophylle qui fonctionnent à merveille avec des notes plus pâtissières (flan à la vanille et noix de coco).

Finale : Bref mais franche, la finale met l’accent sur les notes de fruits mûrs (mangue, ananas) avant de revenir aux céréales avec des arômes de malt frais accompagnés d’une fugace sensation fumée.  

 

Le chaudronnier

Le Boilermaker (Chaudronnier en français) est un mode de consommation de tradition irlandaise : les travailleurs (et plus particulièrement les chaudronniers) avaient prix l’habitude de se rendre au PUB après le travail et de commander une bière et un shot de whisky. Si cet accord est resté populaire outre-manche et aux États-Unis (tradition importée au 19e par les colons irlandais), il connaît aujourd’hui un regain d’intérêt y compris en France.

Un Boilermaker c’est donc un shot de whisky et une bière, ok, mais on les boit comment ?

La première méthode est la plus basique : vous buvez le whisky en entier puis vous attaquez tranquillement la bière.

La seconde façon de boire un Boilermaker revient à laisser tomber directement le shot dans la bière. C’est festif mais pas toujours pertinent d’un point de vue organoleptique.  

Enfin, la troisième façon de faire, et c’est celle que nous retiendrons ici, consiste à faire des allers-retours entre les deux boissons, en prenant une gorgée de whisky puis une gorgée de la bière, jusqu’à ce que chaque boisson soit terminée.

Alors, qu’est-ce que ça donne avec Roc’Elf et sainte Colombe ? Dimitri DAVID, Expert bière de La Maison du Whisky nous répond !

Pour profiter pleinement d’un accord, il est important de déguster les produits au bon moment ! L’idéal est, quel que soit l’ordre de dégustation, de boire le second breuvage lorsque les notes de la finale du premier s’expriment pleinement, pendant la rétro olfaction.

Pour le boilermaker Sainte colombe X Roc’elf , il convient de commencer par le whisky avant de se tourner vers la bière ! Malgré les 10% Vol Alc et la puissance aromatique du vin d’orge, le whisky ne se laisse pas faire et affirme d’autant plus son caractère gourmand et fruité (raisins surmûris).

Même si la finale du whisky se trouve un peu écourtée par le vin d’orge, cette association permet de révéler toutes les subtilités de ce dernier en atténuant la sensation d’alcool pour la remplacer par une onctuosité très généreuse ! Point d’orgue sur le miel et le malt frais qui s’éternisent faisant écho a des arômes pâtissiers (banana bread et éclair au café) !